Ce que n'est pas l'ostéopathie


En France, l'ostéopathie souffre d'une image imprécise, consécutive notamment au fait que pendant très longtemps, elle a été pratiquée par des kinésithérapeutes, dans le cadre de soins de kinésithérapie.

Les patients ont donc progressivement assimilé kinésithérapie et ostéopathie et ne discernent que très vaguement la différence.

Après avoir vu ce qu'elle est, envisageons donc ce qu'elle n'est pas.

Elle n'est pas vertébrothérapie

L'ostéopathie n'est pas de la vertébrothérapie. Certes, les ostéopathes reçoivent beaucoup de demandes concernant les maux de dos, mais le vertébrothérapeute s'occupe de la colonne vertébrale et même s'il peut être très efficace sur le plan du symptôme, il ne s'occupe pas de la globalité de la personne comme doit le faire un ostéopathe.

Elle n'est pas reboutement

Même si Still a reçu une partie de son savoir des rebouteux (il s'est même déclaré un temps « rebouteux éclair » (Lightening bonesetter), il a très vite compris que le reboutement, même s'il était efficace n'était pas suffisant pour permettre à l'ostéopathie de perdurer dans le temps.

Posons-nous la question : combien de rebouteux géniaux ont vécu au cours des siècles ? Aucun n'a laissé de trace après sa mort, parce que son savoir-faire a disparu avec lui.

Doté d'un savoir-faire certainement excellent, le génie de Still a consisté à développer une philosophie (grâce notamment aux philosophes évolutionnistes de son époque, Herbert Spencer et Alfred Russell Wallace) qui a permis à l'ostéopathie de ne pas s'éteindre avec son inventeur.

Cette philosophie, c'est une manière d'envisager la vie et le vivant et elle est une aide précieuse à l'ostéopathe.

Elle n'est pas « craquage »

Beaucoup de patients (et de praticiens) pensent qu'il suffit de faire craquer quelques vertèbres ou quelques articulations pour prétendre pratiquer de l'ostéopathie.

Il n'en est rien. Ces techniques, utilisées en dehors du contexte philosophique particulier à l'ostéopathie, ne sont que des techniques.

Elles peuvent certes apporter du soulagement, mais le patient y est bien rarement envisagé dans sa globalité de personne, physique, mentale, psychique...

Le craquement ne veut rien dire

Il signifie simplement qu'une articulation a été mobilisée de manière vive, ce qui est d'ailleurs, à l'origine du bruit.
Il se peut que cette manoeuvre de mobilisation extrêmement rapide de l'articulation lui procure transitoirement un meilleur jeu.
Mais la plupart du temps, la cause n'étant pas traitée, la vertèbre ou l'articulation ainsi traitée retournera dans sa malposition.

Pour terminer sur cette question, voilà ce que dit Still lui-même à propos du craquement :

« Ce craquement n'est pas un critère auquel se fier.
Les os ne craquent pas toujours quand ils se remettent en place,
pas plus que le craquement ne signifie qu'ils sont correctement ajustés.
En tirant sur votre doigt, vous entendrez un bruit soudain.
La séparation brutale et forcée des extrémités des os formant l'articulation provoque un vide,
et l'air pénétrant dans l'articulation et remplissant ce vide produit ce bruit sec.
Voilà tout simplement l'explication de ce craquement
auquel le patient accorde une telle importance
qu'il est pour lui la preuve que la correction est réussie.
L'ostéopathe ne devrait pas encourager cette idée chez son patient
comme étant la démonstration que quelque chose est accompli.» [1]

Faire craquer peut être dangereux

Beaucoup de praticiens s'acharnent à faire craquer les vertèbres ou autres articulations de leurs patients, pensant par là faire oeuvre thérapeutique. Cela fonctionne évidemment parfois, mais peut aussi être dangereux, sur des structures altérées par l'arthrose, l'ostéoporose ou toute autre anomalie non perçue par le praticien.

Manipuler exige une grande compétence technique

De plus, ce type de technique, pour être indolore et sans danger, nécessite de la part de l'opérateur une grande habileté technique, une perfection du geste que peu atteignent réellement.
Alors, ce qui se passe le plus souvent, c'est que la technique n'est qu'un forçage plus ou moins bien appliqué à l'articulation, avec les conséquences souvent néfastes que l'on peut imaginer.

Combien de patients recevons-nous qui ont été abîmés par ce genre de technique appliquée à tort et à travers ? Nous devrions en ces matières nous rappeler Hippocrate et ses principes, l'un d'eux étant : « d'abord, ne pas nuire. »


[1] A. T. Still, Ostéopathie, Recherche et pratique, Editions Sully, 2001, p. 42